Une apicultrice hors normes.

Article déniché par Agnès, qui sait où butiner pour trouver des trésors. Merci Agnès. Voir le "Blog de la Maison Verte"


Reprise de l'article.

Francine Golay, apicultrice Suisse adepte de la biodynamie, n’élève pas ses abeilles pour le miel. Elle les élève pour les aider à se battre contre les maladies. Elle dénonce l’utilisation des pesticides et prône une apiculture sauvage mais contrôlée.

Francine Golay n’est pas une apicultrice comme les autres: elle élève ses abeilles non pas pour le miel, mais pour essayer de combattre les maux qui entraînent inexorablement le déclin de l’insecte. Et elle n’est pas optimiste, comme elle le fait entendre dans ses nombreuses conférences qu’elle donne pour alerter l’opinion publique: «Partout dans le monde l’abeille s’éteint! On le sait. On parle beaucoup, mais on ne fait rien!»

 

Le varroa n’est pas le seul responsable, insiste la Broyarde établie à Cheyres. «Il n’est que la pointe de l’iceberg.» Le parasite venu d’Asie doit sa puissance destructrice à l’affaiblissement de l’abeille. Un affaiblissement dû à plusieurs facteurs. Dont l’utilisation abusive de pesticides. «C’est tellement facile de nettoyer sa place de parc ou de traiter son jardin avec un herbicide», déplore Francine Golay, qui travaille selon les principes de la biodynamie depuis 25 ans.

Mais il n’y a pas que les particuliers qui sont dans le collimateur de Francine Golay: les agriculteurs le sont aussi. «J’ai pu observer de nombreux insectes de la faune sauvage porter des malformations aux ailes au même moment que mes abeilles. Il y a une relation de cause à effet avec l’utilisation de pesticides.»

 

«Interdire tous les pesticides»

Il y a peu, Greenpeace rappelait d’ailleurs que 172 colonies d’abeilles avaient été anéanties dans l’Emmental, en raison de pesticides extrêmement nocifs pour les butineuses et utilisés dans l’agriculture. L’organisation de défense de la nature saluait alors l’annonce faite par la Confédération de lancer l’élaboration d’un plan d’action pour réduire les pesticides. Tout en précisant: «Il est urgent d’interdire immédiatement les pesticides les plus nocifs.» Pour Francine Golay, cette demande est trop faible: «Ce sont tous les pesticides qu’il faut interdire!»

Photos à l’appui, elle montre les dégâts que les produits peuvent causer: des abeilles qui naissent sans antennes, ou avec des malformations alaires… «Quand une butineuse revient à la ruche souillée par un pesticide, elle se fait lécher par les autres. Ce qui introduit le pesticide dans toute la colonie. Quand elle revient avec du pollen intoxiqué, c’est une bombe à retardement pour le couvain dont c’est la nourriture! Vingt-deux jours après, les malformations apparaissent clairement, spécifiques à chaque pesticide.»

De plus, les pesticides s’attaquent au système nerveux, ou entraînent l’infertilité. «Ça ne touche pas que les abeilles. Toute la faune est menacée. Cela fait 25 ans que j’observe et que je vois basculer les choses. Il n’y a plus de guêpes près de chez moi, plus de coccinelles, plus d’oiseaux chanteurs… Cela fait deux ans que je n’entends plus le rut du renard.»

 

Lui laisser le choix

Francine Golay, qui prône une apiculture sauvage mais contrôlée, cite également dans la partie immergée de l’iceberg l’apiculture moderne. «Il y a cent ans, l’initié Rudolf Steiner disait déjà que l’abeille allait disparaître si nous persistions à pratiquer une apiculture visant à produire le plus de miel, misant sur les croisements. «On ne doit pas imposer nos règles à l’abeille. Quand on lui laisse le choix, on constate qu’elle ne fait pas du tout ce que nous aimerions qu’elle fasse. Mes abeilles vivent selon leur propre loi. Et il y a une sélection naturelle qui se fait. Je les laisse se reproduire par essaimage, et non par insémination artificielle. C’est comme si on voulait perpétuer la race humaine par insémination. C’est une aberration. Et on se retrouve avec les dérives actuelles. Avec un affaiblissement terrible de l’abeille.»

Or, pour que l’insecte puisse affronter les maladies, il lui faut d’abord avoir la santé. Raison pour laquelle Francine Golay ne récolte pas son miel, mais le laisse à ses protégées. «Le miel est le concentré de toutes les qualités pharmaceutiques des plantes officinales butinées. Quand en juin on leur prend le miel et qu’on leur donne du sucre à la place, ce n’est pas bon: le sucre n’est pas digeste pour elles. Cela n’a rien à voir avec le nectar. Elles ont au contraire besoin de leur miel, le fruit de leur travail des derniers mois.»

Pour sauver ses abeilles, Francine Golay teste également depuis plusieurs années des produits homéopathiques qu’elle met elle-même au point. Avec succès: elle n’avait plus de varroas dans certaines colonies. Mais ça n’a pas empêché l’apicultrice de perdre treize de ses quinze colonies d’un coup, à cause d’un insecticide contre le ver de la cerise, utilisé dans le voisinage. «Si on ne veut pas comprendre, il n’y aura plus rien. Les espèces s’éteignent par palier. Pour l’abeille, on a atteint le dernier palier.»

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