L’irradiation gamma pour la stérilisation du matériel apicole

Le matériel apicole constituant un réservoir d’agents pathogènes, l’adoption de pratiques de stérilisation est vitale. L’irradiation par rayons gamma, déjà adoptée dans les domaines agroalimentaire et médical, permet de stériliser l’ensemble du matériel et a déjà montré son efficacité sur la loque américaine.  Une équipe de chercheurs américains s’est intéressée à son effet sur d’autres pathogènes (champignon, virus), mettant en évidence son large spectre d’action et son potentiel comme méthode de désinfection universelle du matériel apicole.

En raison de la capacité de la loque américaine à sporuler, la pratique standard en cas d’infection est de détruire l’ensemble de la ruche par le feu. Il a été démontré par ailleurs que de nombreux agents pathogènes (virus, champignons) peuvent également être retrouvés dans les alvéoles. Le matériel apicole, s’il n’est pas traité, peut transmettre des infections d’une ruche à une autre. Dans l’objectif de limiter ce risque, il est nécessaire d’adopter des pratiques de stérilisation. Parmi les différentes méthodes explorées au cours des dernières années, l’irradiation par rayons gamma, déjà pratiquée de manière standard dans les domaines agroalimentaire et médical, est prometteuse. Elle peut être employée sur l’ensemble du matériel (cadre, cire …). Elle a déjà fait ses preuves sur la loque américaine et sur la stérilisation du pollen récolté.

Une équipe de chercheurs américains s’est intéressée à son effet sur d’autres pathogènes : le champignon Ascosphaera apis responsable du couvain plâtré, la microsporidie Nosema ceranae (nosémose) et trois virus (Deformed wing virus [DWV], Black queen cell virus [BQCV], and Chronic bee paralysis virus [CBPV]). A cet effet, ils ont irradié ces pathogènes (25 kGy pendant 10 h) avant de les inoculer à des abeilles Apis mellifera. Ils ont observé une inactivation totale de Ascosphaera apis, Nosema et du DWV. En revanche, l’inactivation est partielle pour les virus BQCV et CBPV (baisse de la réplication virale, charge virale plus faible). Il n’y a pas de baisse de la mortalité des abeilles inoculées par rapport à celles contaminées par des virus non-irradiés. Cet effet est attribuable à la structure génomique particulière des virus, protégeant leurs gènes des effets de l’irradiation. L’établissement de courbes doses-réponses est nécessaire pour déterminer si cette méthode peut être efficace sur ces deux pathogènes et déterminer les facteurs d’irradiation optimales. Toutefois, l’irradiation par rayons gamma a le potentiel d’être une méthode de traitement universelle du matériel apicole.

Simone-Finstrom et al.  Gamma irradiation inactivates honey bee fungal, microsporidian, and viral pathogens and parasites. 2018. Invertebr Pathol. 153:57-64. doi: 10.1016/j.jip.2018.02.011.

Note de l’auteur :

Au Canada, l’irradiation est actuellement une pratique standard chez les apiculteurs, amateurs inclus. Par exemple, en Colombie Britannique, les apiculteurs non professionnels déposaient leur matériel chez la référente apicole locale qui réservait un créneau pour une irradiation par électrons accélérés. Au Québec, c’est l’irradiation gamma qui est privilégiée, avec un cout de l’ordre de 5,43 CAD (≈ 3,5 €) par hausse¹. En France, d’après l’ASN (autorité de sécurité nucléaire) il existe cinq installations industrielles d’ionisation par rayons gamma²